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al testo di Teresa Nastri
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Cher Jacques, Je voudrais que tu saches que je t'aimais bien jadis, quand nous nous écrivions, et que cette correspondance représenta pour moi, durant une année presque, tout ce à quoi je tenais le plus, qui me donnait des battements de coeur, comme l'on n'en connaît qu'à l'âge des grandes émotions, des espérances hardies, des rêves d'éternité... Je me rappelle encore ma première lettre à cet inconnu que tu étais - dont un camarade m'avait donné l'adresse. Ce fut une lettre conventionnelle, polie, telle que les circonstances le demandaient. Ta réponse arriva bientôt: tu acceptais mon offre d'amitié épistolaire; tu étais poli, convenable, conventionnel... Et j'aimai tout de suite ton écriture, la couleur de ton encre, ton style. Mais je ne sus pas m'en tenir longtemps aux conventions. Ma troisième lettre à toi portait déjà les marques de mon emotivité, parlait le langage dramatique du coeur, qui s'égarait partout à la poursuite d'une idée de bonheur - qu'il n'aurait cependant pas reconnu, se fût-il par hazard matérialisé devant lui au coin même de la rue. Il aurait fallu que ce fût un bonheur difficile à trouver, non à cause d'une qualité particulièrement rare, à laquelle mon coeur attachât plus d'importance qu'à d'autres. A bien réfléchir, maintenant, je m'aperçois que l'idée même de bonheur, pour moi, était assimilée à celle de la souffrance. Ce qui fait que le bonheur m'était interdit par la conception même que j'en avait. Ainsi, j'étais contente de nos premières lettres, mais je ne sus pas m'empêcher de laisser pénétrer dans les miennes ces élans de l'esprit susceptibles d'entraîner les déchirements de la détresse. Adieu, mon Ami
(lettera mai partita)
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